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Le vent de la démocratie en Afrique, le tour du Rwanda et le sort de Kagame

Le vent de la démocratie en Afrique, le tour du Rwanda et le sort de Kagame
Manifestation à la place Tahrir en Egypte

Manifestation à la place Tahrir en Egypte

Au cours des derniers mois, nous avons observé des  soulèvements inattendus de populations opprimées  au nord de l’Afrique et au Moyen-Orient. Des foules de gens sont sorties dans les rues contre leurs gouvernements pour réclamer plus de liberté et de démocratie.

Cela a rappelé au monde que c’est dans la nature humaine d’être libre et que lorsque ce droit fondamentale est limité ou dénié par la force, la situation aboutit souvent à un point où l’être humain utilise tous les moyens possibles pour acquérir cette liberté.

Des réactions fortes, souvent brutales, utilisées par les populations  pour réclamer leur liberté démontrent  aussi que celle-ci est une condition essentielle pour assurer l’épanouissement de l’être humain en valorisant son potentiel pour son bien-être individuel et collectif.

Nous avons vu que la croissance économique et durable des pays ne peut pas freiner la révolution des populations  lorsque la liberté leur est déniée.

Dans son article récent  publié dans le journal syndical ‘’Project syndicate’’, le président de la Banque Africaine de Développement et ancien ministre des finances du Rwanda, M. Donald Kaberuka a écrit : ‘‘ Comme un volcan longtemps en sommeil profond qui soudainement  entre en éruption , les révolutions qui ont balayées l’Afrique du Nord – dans un contexte de forte performance économique – a surpris tout le monde  ». Il a ensuite ajouté  » La leçon des soulèvements en  Afrique du Nord est claire: il ne s’agissait pas d’une révolution  idéologique, mais de liberté, d’inclusion sociale, de voix politique et de responsabilisation du gouvernement  »

Ces révoltes et révolutions des populations en Afrique du Nord et au Moyen-Orient  ont déclenché en moi  une nouvelle façon de voir  et d’analyser ce qui peut potentiellement se produire au Rwanda : à savoir Qu’un jourla population rwandaise pourra agir de la même manière pour réclamer sa liberté, étant donné que les populations des pays qui ont changé de pouvoir récemment par  des soulèvements populaires avaient des griefs identiques ou similaires à ceux de la  population rwandaise.

Ceci m’amène à me demander quel sera le sort de l’actuel président rwandais Kagame. Y a-t-il encore une chance de  changer son régime dictatorial ou il est déjà trop tard ?

Les signes montrent  que le vent de la démocratie est entré au  Rwanda et qu’il est dans sa phase initiale. Il y a un nombre croissant d’opposants politiques dans le pays et en exil, de plus en plus de membres du parti au pouvoir qui quittent ce dernier ainsi que leurs fonctions au sein du gouvernement pour protester contre les méthodes de gouvernance dictatoriales du président. On remarque une  augmentation du  nombre de plates-formes médias qui sont de plus en plus critiques au régime actuel, un nombre croissant de jeunes qui utilisent internet et des sites de réseaux sociaux  pour exprimer leur malaise avec l’actuel régime, tous sont des signes très significatifs  de changement.  Il est actuellement évident que des voix de plus en plus nombreuses appellent à plus de liberté et de démocratie au Rwanda.

Malheureusement pour le régime actuel, plus il fait tout son possible pour supprimer ce vent de changement,  plus ce vent se renforce. Je préférerais que ce vent de liberté n’atteigne pas la phase forte de la tornade malgré qu’à cette phase il peut amener la liberté et la démocratie réclamées. A ce moment-là les dommages collatéraux qui peuvent être causés par ce vent de seraient sans aucun  doute déplorables.

Je crois fermement que seul Kagame a la clé qui peut empêcher l’irréparable en prenant des mesures nobles qui ouvrent aux  Rwandais  le chemin de la liberté, de la démocratie et de la réconciliation véritables.

Les plus importantes de ces mesures nécessaires seraient les suivantes :

– La libération de tous les prisonniers politiques, militants des droits de l’homme et journalistes

– L’ouverture de l’espace politique

– L’organisation d’un véritable dialogue inter-rwandais  hautement  inclusif  afin de favoriser la vraie réconciliation nationale et ouvrir la voie à la liberté et à la démocratie.

 Chaque jour qui passe, le vent de la liberté se renforce et diminue rapidement les chances de Kagame et son régime de rester au pouvoir pour longtemps. Si Kagame considère ces mesures simples et importantes, il entrera sans aucun doute dans l’histoire du Rwanda comme un dirigeant politique qui,  au courant de son régime dictatorial et d’oppression, a modifié le cours de son parcours politique et idéologique afin de mettre son pays sur le chemin de la liberté et de la  démocratie avec une paix durable, soutenue par une population réconciliée.

Ces actions éviteraient finalement à Kagame d’être capturé de la même façon que Saddam ou Gbagbo ou contraint à l’exil au même titre que Ben Ali et autres. Je ne souhaiterais pas que cela lui arrive.

La carte du Rwanda

La carte du Rwanda

Il est largement documenté et connu que le régime de Kagame a commis beaucoup d’atrocités  aussi bien au Rwanda que dans des pays limitrophes particulièrement en République démocratique du Congo et en Ouganda. Par l’observation et l’analyse de ses actions actuelles, il est évident et clair qu’elles sont inspirées et influencées par une grande peur de perdre le pouvoir dans le cas où la démocratie et la liberté atteindraient son pays et de finir par être jugé et puni pour sa responsabilité dans toutes  ses exactions criminelles  passées et actuelles.

Afin de contrecarrer le vent du changement et ainsi  conserver le pouvoir, Kagame et son régime utilisent diverses méthodes qui combinent l’oppression des opposants et les attaques contre les critiques. En outre, il met tout en œuvre pour peaufiner son image internationale de héro de son peuple et de célèbre leader visionnaire.

L’oppression des opposants et les attaques contre les critiques consistent en des assassinats et des tentatives d’assassinats d’opposants, l’oppression de la liberté d’expression et des médias, l’emprisonnements  des dissidents, l’entrave ou l’interdiction des actions des organisations internationales des droits de l’homme au Rwanda, etc. …

La promotion de son image inclut l’utilisation d’entreprises européennes et africaines de relations publiques pour l’aider à embellir son image à l’échelle internationale comme un chef qui a obtenu des résultats économiques  exceptionnels, qui a instauré la stabilité et mis un accent particulier sur la promotion de la femme. Cette belle image est véhiculée à travers des articles dans les journaux, des documentaires pour les chaînes de télévision, des discours organisées dans les universités de part le monde, etc …

Malheureusement pour lui, ces méthodes ne peuvent pas triompher contre la détermination du peuple qui aspire à la liberté. L’histoire du monde à travers le temps  nous enseigne que la volonté du peuple  de se libérer a toujours triomphé contre toute forme de répression.

Dans le cas où il décide de ne pas prendre la  voie du changement voulu par le peuple, il sera capturé dans un sens ou dans l’autre et entrera  dans l’histoire comme l’un des pires leaders  que son pays et la région aient connus, qui a apporté la souffrance et la mort à  son peuple. Sa période de gouvernance sera considérée comme la pire période de l’histoire de son pays.

Un ancien membre du Front Patriotique Rwandais vivant actuellement en exil à Londres estime que, compte tenu de la personnalité de Kagame, il est peu probable qu’il se plie  à la volonté du peuple en acceptant d’initier des changements appropriés et nécessaires au Rwanda.

Mr Bitwayiki, qui est psycho-analyste spécialisé dans le comportement humain à la suite d’une forte crainte et l’instinct de l’autoprotection à l’Université de Dublin, pense que Kagame pourrait changer et entreprendre la bonne démarche après avoir réalisé que c’est la meilleure façon qui a le potentiel de lui garantir une bonne sortie du pouvoir et une vie libre après son régime.

Mais Bitwayiki stipule que cela peut se produire uniquement s’il y a suffisamment de pression exercée sur lui, générant ainsi un grand affolement qui l’entraînerait a prendre conscience que ses méthodes de diriger lui apporteront un grand danger bientôt. Cette prise de conscience l’amènerait aussi à constater que ceux qu’il considère comme ses protecteurs ou protecteurs potentiels le lâcheraient si son régime venait à tomber.

Au cours des dix dernières années, la démocratie et la liberté ont été solidement installées dans de nombreux pays africains et leurs populations en profitent actuellement. La liberté des médias, l’espace politique et la participation à la gérance du bien public, les  élections libres et justes ainsi que le transfert pacifique du pouvoir sont devenus dans ces pays une normalité  quotidienne. Parmi ces pays on peut citer le Bénin, le Ghana, la Zambie, le Botswana, la Namibie, le Malawi, l’Afrique du Sud, etc …

Le Rwanda ne sera pas laissé pour longtemps, coincé dans les années 1970-1980 quand la plupart des pays africains étaient dirigés par les commandants militaires que se succédaient et qui dirigeaient leurs pays au bout des fusils et canons et en terrorisant leurs peuples.

Les expériences du génocide et des massacres des populations, la crise des réfugiés et les graves abus de droits humains devraient avoir déjà transformé le Rwanda en un pays modèle de liberté, de démocratie et de l’inclusion sociale parce son peuple a beaucoup souffert à cause du manque de ces valeurs. Les leaders et politiciens rwandais devraient actuellement être déjà devenues des experts et des modèles de la promotion de ces valeurs  pace qu’ils ont connu le pire des conséquences causées par le manque de ces valeurs.

Les Rwandais n’ont pas besoin de beaucoup de choses et ne demandent pas l’impossible à Kagame ou à tout autre politicien. Ils ont juste besoin d’un état de droit, de liberté et du respect de leurs droits en tant qu’humains. Ils ont besoin d’un pays où les institutions ont plus d’importance que les individus et leur apportent protection, cohésion sociale, développement,…

Je ne doute pas que bientôt  la liberté et la démocratie arriveront certainement au Rwanda. Ce dont je ne suis pas certain c’est comment elles y atterriront. Cela dépendra uniquement de la nature des mesures et décisions relatives à la gouvernance que le président Kagame prendra dans les prochains mois. C’est cela qui déterminera également le sort de ce dernier.

René C Mugenzi
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