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Il y a deux ans, Victoire Ingabire retournait au Rwanda

Il y a deux ans, Victoire Ingabire retournait au Rwanda

C’est le 16 janvier 2010, qu’Ingabire Victoire a rebroussé le chemin pour rentrer dans son pays natal le Rwanda et y faire enregistrer son parti en vue des élections présidentielles qui allaient se tenir la même année. Rentrée après 17 ans d’exil aux Pays-Bas, elle aura peu goûté à la liberté, puisqu’arrêtée dès le mois d’octobre de cette même année. Depuis lors, elle est trainée devant la justice,  accusée de « complicité de terrorisme et atteinte à la sûreté de l’État »; cependant, ses partisans et certaines organisations ne cessent de dénoncer le caractère politique de ce procès. Son courage, sa ténacité et son héroïsme politique à tenir tête à la dictature militaire de Paul Kagame qui ne tolère aucune opposition, lui a valu le surnom d’ « Aung San Suu Kyi  » rwandaise.
Victoire Ingabire préside les Forces démocratiques Unifiées (FDU-Inkingi), un parti créé en avril 2006 en exil, et que les

Victoire Ingabire Umuhoza

Victoire Ingabire Umuhoza


autorités rwandaises refusent d’agréer jusqu’à maintenant. Connue pour ses positions très critiques contre l’actuel président Paul Kagame, elle a été arrêtée le 14 octobre 2010 à Kigali, juste après son retour au Rwanda en janvier 2010, après 17 ans d’exil aux Pays-Bas. Après son arrestation en octobre 2010, l’organisation de défense des droits de l’Homme Human Rights Watch a manifesté ses inquiétudes contre une répression de plus en plus présente contre l’opposition au Rwanda, et a appelé les autorités de Kigali à « autoriser » l’opposition à « exercer ses activités ».
Une femme de convictions
Dès son arrivée au Rwanda il y a deux ans, elle a visité le mémorial du génocide à Kigali et a estimé que, « les auteurs des crimes contre les Hutu et Tutsi doivent être systématiquement poursuivis ». En dénonçant, en plus du génocide commis contre les Tutsi, les crimes commis par le FPR  de Paul Kagame à l’encontre des Hutu, elle avait brisé un tabou au sein de la société rwandaise, s’attirant les foudres du régime de Kigali qui a commencé à la qualifier de « révisionniste, négationniste » et lui rendre la vie difficile.
Pourtant des milliers de témoignages ainsi que le « Mapping report »  des Nations Unies sur les violations les plus graves des droits humains et du droit international humanitaire commises sur le territoire de la République Démocratique du Congo entre mars 1993 et juin 2003, confirment ce qu’avance Victoire Ingabire. En février 2010, elle est victime d’une agression physique dans les bureaux de l’administration, puis mise sous enquête judiciaire. Le 21 avril 2010, elle est arrêtée et passe la nuit en prison. Le lendemain, elle est mise sous contrôle judiciaire, en résidence surveillée. Le 28 mai 2010, l’avocat américain Peter Erlinder, venu pour sa défense, est mis en prison lui aussi. Il sera relâché trois semaines plus tard, officiellement « pour raisons médicales » et expulsé du pays. Pourtant parfaitement consciente du danger contre sa vie, et d’énormes difficultés, Mme Ingabire n’a pas rechigné à dénoncer les dérives autoritaires du régime de Kigali qui ferme l’espace politique à l’opposition politique, et harcelle, agresse et tue les opposants. « Nous n’avons pas peur de dire au monde entier que les Rwandais sont sous le joug de la peur et de l’obscurantisme, que la famine est criante dans les campagnes rwandaises et que les chiques, signe attestant de la grande misère dans notre pays, qui avaient disparu dans beaucoup de régions du pays, ont réapparu ». A-t-elle déclaré dans un message adressé à ses partisans le 03 mai 2010.
Ce courage politique d’une opposante qui ose défier le dictateur Paul Kagame qui règne sur le Rwanda sans partage depuis près de 18ans, lui a valu le surnom d’ « Aung San Suu Kyi  » rwandaise par ses admirateurs.
Un procès politique à son encontre
Le procès qui est intenté à l’encontre de Victoire Ingabire présente tous les traits d’un procès politique. Tout d’abord, le procureur a laissé entendre que Victoire Ingabire a été arrêtée sur des informations fournies par le témoin, le colonel Tharcisse Nditurende. Or dans le procès, il s’est avéré que l’accusation a recueilli les déclarations de ce témoin trois jours après l’incarcération de la présidente du parti FDU. En plus de cela, il faut ajouter la partialité visiblement flagrante de son procès, qui  est marquée par la « collusion exacerbée entre le ministère public et les juges, les menaces à répétition contre les avocats de la défense, le refus par les juges de contre-interroger les témoins de l’accusation, le rejet intempestif des pièces de la défense ou encore l’usage des lois non rétroactives pour des faits supposés avoir eu lieu avant la promulgation ». La présidente des FDU Inkingi elle même a maintes fois dénoncé le caractère politique de son procès. « Ce procès qu’on veut m’intenter est un prétexte, un faux procès car, même mes accusateurs savent pertinemment que le dossier est vide et que je suis innocente. Puisque je suis leur adversaire politique, ils ont recouru à une presse partisane qu’ils contrôlent et aux autorités administratives acquises à leur cause pour me traîner dans la boue « . a-t-elle continué dans son message du 03 mai 2010.
Impossible de se présenter à un  scrutin verrouillé
L’opposante rwandaise, était rentrée d’exil pour prendre part aux élections présidentielles qui ont eu lieu en aout 2010, face aux tracasseries administratives, les harcèlements répétés à son encontre, et son incarcération, elle n’a été autorisée ni à faire enregistrer son parti ni se présenter au scrutin. Le président sortant, le dictateur Paul Kagame a pris le soin d’écarter les vrais opposants, et choisir lui-même qui va l’affronter au cours de cette mascarade électorale. Lors de ce scrutin, Paul Kagame a été opposé à trois candidats mineurs, qui ne sont d’autres que ses amis. Les trois rivaux de Paul Kagame qualifiés de « candidats fantoches » par certains, sont Jean Damascène Ntawukuriryayo, vice-président de l’Assemblée nationale et ancien ministre de la santé ; Prosper Higiro, du Parti libéral (PL), vice-président du Sénat et ancien ministre du commerce ; Alvera Mukabaramba, sénatrice, du Parti du progrès et de la concorde (PPC). Tous trois avaient soutenu Kagame lors de l’élection présidentielle de 2003. Le dictateur a ensuite mis en garde ceux qui tenteraient de s’opposer à lui : « Ceux qui veulent la guerre, ils auront la guerre » avait il prévenu lors d’un meeting du mardi 3 août près de Kigali. L’ancien chef de guerre qui a, après la guerre, endossé la tenue de chef d’Etat a bien pris soin d’écarter tous ceux qui, à la faveur de cette élection, pouvaient le battre, notamment Victoire Ingabire, Bernard Ntaganda, Déo Mushyayidi et Franck Habineza, tous quatre empêchés de se présenter aux élections.
C’est ainsi que les semaines précédentes la tenue de l’élection, un système de répression systématique contre l’opposition a été mis en place : « tueries, arrestations et fermeture de journaux et de radios (30 médias avaient alors été suspendus par le Haut Conseil des médias rwandais le 26 juillet 2010).
Des manifestations se tiennent plus souvent dans plusieurs  grandes villes d’Europe, pour demander la libération sans condition de Victoire Ingabire, et  plusieurs autres prisonniers politiques qui croupissent dans les prisons rwandaises; les plus connus sont notamment Déo Mushayidi, Bernard Ntaganda, Charles Ntakirutinka, Théoneste Niyitegeka et bien d’autres détenus pour leurs idées politiques.
Alors que les régimes dictatoriaux qui régnaient depuis des décennies dans  les pays  arabo magrébin s’effondrèrent comme des châteaux de cartes,  le régime rwandais de Paul Kagame poursuit imperturbablement ses atrocités : harcèlement, répression et assassinats des opposants et des journalistes, persécution des réfugiés, privation des libertés, etc.
Même la Birmanie, considérée depuis longtemps comme l’un des plus grands régimes dictatoriaux de la planète commence à se démocratiser. Après le départ précipité du président  Ben Ali, la démission et le procès de Moubarak, l’exécution extrajudiciaire de  Kadhafi,  le régime dictatorial de Paul Kagame doit comprendre  qu’aucun régime dictatorial n’est destiné à perdurer. Le temps de la réflexion est sans doute venu. La privation des libertés fondamentales et des situations considérées auparavant comme acceptables, ne sont plus acceptées, le temps d’œuvrer pour la démocratie est venu, même la junte militaire birmane a fini par le comprendre, il est temps que le général Kagame le comprenne dans l’intérêt de tous les rwandais. Lui-même compris bien entendu.
Jean Mitari
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