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L’Afrique : on fête ou on fait le deuil ?

L’Afrique : on fête ou on fait le deuil ?
50 ans d’independance

Afrique

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Est ce que le continent africain, aujourd’hui, est toujours ce qu’il a toujours été? La question est certes vaste, mais non moins pertinente, surtout pour la nouvelle génération. Car encore de nos jours, certains sont encore portés à croire que c’est le cas. L’Afrique n’a pas changé, de même que les africains. Certains iront même plus loin en disant qu’elle ira de mal en pis. Ces derniers on les appellera les afro pessimistes. Mais peut-on se contenter de ces simples affirmations dérivées des crises post-indépendances ?  Des échecs cuisants du FMI et de la Banque Mondiale et leurs politiques d’ajustements structurels, suite à la crise des matières premières fin des années 70’ forçant les nouveaux États africains endettés à davantage de privatisations, n’ont fait qu’empirer les choses.
On vient de fêter les 50 ans d’indépendance du continent noir. Deux générations sont passées et l’on ne sait toujours pas ce qu’est l’Afrique et les africains. Pourquoi tant d’échecs ? Car à ce jour, on ne peut se voiler la face : le bilan, après ces cinquante ans passées, est désastreux. Cependant, la génération actuelle n’accepte plus de se contenter d’explications ou moralités déjà toutes faites. On cherche les raisons, encore et partout. Le(s) coupable(s). Est-ce l’occident : ses ravages du colonialisme et ses prêts aux intérêts exorbitants? Est-ce nos parents toujours ancrés aux valeurs africaines anciennes opposées au monde occidental actuel ? Est-ce le sort du continent, de l’homme noir ? Je pense ici, à Haïti, pourtant autrefois la colonie la plus prospère au monde. Est-ce l’aide octroyée au continent qui alimente la corruption et la dépendance comme le dit Dambisa Moyo dans son livre adulé et critiqué « l’Aide Fatale » (2009)? Qu’on regrette le départ du colon ? Il y avait de l’emploi, des chemins de fer, des écoles et hôpitaux, au moins ! Que voulait dire le président français Nicolas Sarkozy à Dakar le 26 juillet 2007 en disant « l’homme moderne qui éprouve le besoin de se réconcilier avec la nature a beaucoup à apprendre de l’homme africain qui vit en symbiose avec la nature depuis des millénaires » Le mythe du bon sauvage revisité par Sarkozy…ou encore « le problème de l’Afrique, c’est qu’elle vit trop le présent dans la nostalgie du paradis perdu de l’enfance (…) le développement qui ne va pas assez vite » La colonisation n’est pas responsable, selon lui, des dictateurs, des génocides, de la corruption en Afrique. Qui l’est alors ? Je rebondis aussitôt sur l’idéologie de la fameuse “mission civilisatrice” à l’aube du colonialisme par l’un des plus grands écrivains du 19ème siècle, Victor Hugo. Lui aussi en a dit pas mal sur le continent noir, comme son discours du 18 mai 1879 : « Que serait l’Afrique sans les blancs ? Rien ; un bloc de sable ; la nuit ; la paralysie ; des paysages lunaire. L’Afrique n’existe que parce que l’homme blanc l’a touchée (…) l’Afrique n’a pas d’histoire (…) Cette Afrique farouche n’a que deux aspects : peuplée, c’est la barbarie ; déserte, c’est la sauvagerie (…) ». Plus de cent ans séparent ces deux discours de ces deux personnes hautement considérées. Pourtant le fond n’a guère changé faut-il en conclure. On n’est pas sorti de l’auberge…africaine. Mais il y a, en parallèle, du positif et du mouvement. Les derniers, et pas des moindres : l’élection du premier président métisse, Barack Obama et la première coupe du Monde en Afrique du Sud qui furent tous deux un succès et un message d’espoir pour tous ceux qui commençaient à croire à la fameuse malédiction de Cham.
Rappelons-le quand même qu’avant ces grands événements l’Afrique a fait du chemin ! L’abolition de l’esclavage et la proclamation de la première république noire que fut Haïti, les Civil Rights Mouvements, les Indépendances… Le meilleur reste-t-il à venir ? Une chose reste évidente : les africains sont les grands oubliés de ces derniers siècles et grande est l’ignorance qu’on a envers ce peuple et sa diaspora. A l’écrivain suédois, Mankell Henning de constater en disant : « Nous savons comment meurent les Africains, mais jamais comment ils vivent » Je le paraphraserai autrement, notamment, que nous savons de quoi meurent ces derniers, mais jamais de quoi ils vivent.
Quel est l’avis des africains et de sa diaspora d’eux-mêmes et de leur continent ? Qu’est-ce que c’est d’être Noir au pays des blancs, au 21ème siècle ? Comment valoir sa différence en étant tous égaux face à la loi ? Voilà le challenge aujourd’hui de l’occident face à la diaspora africaine dans les grandes métropoles européennes : où tout a tendance à se jouer sur une nuance…de peau, ou presque. Cette « réconciliation des peaux »  passera par la (re)découverte de l’autre dans son entièreté, son histoire propre et sa diversité. Car l’image que nous projette les médias sur le continent est encore parsemé de fantasmes et de stéréotypes, qui n’ont pas fini d’alimenter l’inconscient collectif des blancs comme des non-blancs, à commencer par les noirs eux-mêmes. Mais n’est ce pas avant tout l’histoire d’une rencontre, brutale certes ? L’Afrique n’est pas ce bloc de sable à partager pour résumer V. Hugo, mais bien un continent dont ses habitants ont toujours été en perpétuel mouvement. Ces derniers ont longtemps été marginalisés car ils avaient peu en commun avec l’Europe des Lumières, notamment par la carence de traditions écrites – qui soit disant – légitime toute civilisation.
Il est temps à présent  de redécouvrir ce continent mal compris. Et mon espoir est que le 21ème siècle sera celui de l’Afrique. Après des siècles de traite, qui la vidée de ses forces vives, aujourd’hui, enfin, le continent émerge et commence à afficher des taux de croissance économiques et démographiques aux chiffres plus qu’impertinents. Cela dit, le chemin reste long. Mais en Afrique on prend son temps et les afro-pessimistes ne perdent rien pour attendre…
Jean Bigambo.

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