En effet, le HCR a recommandé aux États de se prévaloir de la clause la cessation du statut de réfugié à partir du 31 décembre 2011, et qu’elle devienne effective le 30 juin 2012. L’organisme onusien a, pour ce faire, invoqué comme principale raison la « normalisation de la vie politique au Rwanda » .
Reporters Sans Frontières se demande de quelle normalisation le HCR parle. “Le président Paul Kagame a été réélu en 2010 avec 93% des voix, lors d’une élection à laquelle ses principaux opposants n’ont pas pu participer. L’une croupit en prison (NDLR: Victoire Ingabire Umuhoza), un autre se trouve en exil et a échappé à une tentative d’assassinat(NDLR: Kayumba Nyamwasa). Les autorités rwandaises ne tolèrent pas la critique. La presse indépendante est harcelée” a encore déclaré l’organisation.
L’organisation a dénoncé le danger que certains réfugiés courent, même en exil. Elle mentionne ainsi le cas de trois journalistes rwandais réfugiés à Kampala qui ont été victimes d’une « mystérieuse » agression et aussi celui de leurs confrères qui un an auparavant avaient été confrontés à un pareil incident.
Reporters Sans Frontières a également estimé que l’approbation par le HCR et les Etats concernés du retrait aux réfugiés rwandais de leur statut ainsi que la facilitation du retour forcé au Rwanda revenaient donc à la mise en danger de dizaines de personnes, dont de nombreux journalistes, a encore ajouté Reporters Sans Frontières.
En marge de la session annuelle du Comité exécutif du Haut Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (HCR) à Genève, l’agence et les représentants du gouvernement rwandais ont en effet accepté de convoquer en décembre une réunion de tous les États et autres acteurs concernés, afin d’atteindre un plus grand nombre de rapatriements volontaires et de trouver plus d’opportunités pour l’intégration locale ou un statut alternatif pour les réfugiés se trouvant dans des pays d’asile.
Une journaliste rwandaise réfugiée en Europe a entre autres déclaré à Reporters Sans Frontières que le démantèlement des camps de réfugiés est la meilleure solution pour lutter contre la réorganisation des groupes dangereux à l’est du Congo mais que néanmoins “retirer le statut de réfugiés aux opposants politiques, aux journalistes et aux défenseurs des droits de l’homme qui risquent la prison ou l’assassinat serait une grosse erreur, une violation grave des droits de l’homme« .
L’organisation rapporte qu’un autre journaliste rwandais réfugié en Afrique australe a pour sa part affirmé que “(…) au Rwanda, il suffit de vous accuser injustement de ’négation du génocide’ ou de ’révisionnisme’, et vous vous retrouvez en prison. On ne peut pas rentrer dans un pays où la justice arbitraire est reine. » En effet, poursuit RSF, le cas des deux femmes journalistes Agnès Uwimana Nkusi et Saidat Mukakibibi, qui ont été condamnées cette année à 17 et 7 ans de prison pour « incitation à la désobéissance civile », « divisionnisme » et « négation du génocide », illustre très bien cette problématique.
Mis à part l’inquiétude exprimée par Reporters Sans Frontières, rappelons que 28 associations d’Europe, d’Amérique et d’Afrique avaient adressé le 28 mai 2011 un mémorandum au HCR dans lequel elles expriment « leurs profondes préoccupations » et avaient lancé une pétition en ligne qu’elles invitaient un maximum de rwandais et amis du Rwanda à signer.