Aujourd’hui, les 7 milliards d’humains qui peuplent la terre parlent entre 6 000 et 7 000 langues. D’ici 2100, la moitié d’entre elles auront disparu, selon l’Unesco. Des linguistes estiment qu’une langue meurt en moyenne tous les quinze jours. Le Kinyarwanda y passera-t-il aussi ? Afin d’éviter l’extinction du Kinyarwanda, la Communauté des ressortissants rwandais en Belgique, Corwabel en abrégé, en collaboration d’autres associations, organise ce vendredi 29 mars une nouvelle édition de la Journée de la langue maternelle.
Il y a de la place pour beaucoup de langues dans le cerveau
C’est un vieux préjugé : le multilinguisme demande trop d’efforts aux enfants et aucune des langues n’est apprise correctement. Néanmoins, des recherches actuelles prouvent le contraire : les enfants qui évoluent jeunes dans un environnement bilingue sont plus flexibles au niveau intellectuel et bénéficient d’une meilleure perception.
En effet, jusqu’à l’âge de trois ans, les différentes langues sont « enregistrées » dans une seule région cérébrale. Le cerveau des enfants travaille donc de manière très efficace. Du fait du principe de l’imitation, ils apprennent plusieurs langues aussi bien et de manière aussi sûre qu’une seule. C’est pourquoi des chercheurs parlent d’une « double acquisition de la première langue ».
Dans le cas du Kinyarwanda, les parents ne doivent donc pas avoir peur d’enseigner dès le bas âge à leurs enfants aussi bien le Kinyarwanda, qu’une autre langue ou plusieurs autres langues car il y a de la place pour beaucoup de langues dans le cerveau. D’ailleurs comme le proverbe rwandais le dit : « Igiti kigororwa kikiri gito ».[1]
La langue maternelle : vectrice de la culture
« Ko mbona abazi gusoma inyuguti bivugira gusa indimi z’ahandi, umuco wacu uzarangwa nande »[2] se questionna un jour un sage.
En effet, la culture étant l’âme d’un peuple, et la langue maternelle étant sans doute le meilleur vecteur de cette première, il est important pour l’identité culturelle de maîtriser la langue de son pays d’origine. A défaut, ce n’est pas seulement la connaissance de sa langue d’origine qui y périt, mais également sa culture.
Remettre le Kinyarwanda au centre des préoccupations
C’est dans ce contexte que l’ASBL Corwabel, en collaboration avec les ASBL Fora, Inyange et ISOP, avec le soutien de la Commission communautaire flamande, dans un souci de remettre le Kinyarwanda au centre des préoccupations, organise une Journée consacrée à la langue maternelle.
A cette occasion, la pièce de théâtre « Naragenze ndabona » écrite et jouée par des jeunes ressortissants rwandais de Belgique sera projetée. Cette pièce de théâtre met en avant les problèmes auxquels les jeunes rwandais sont confrontés en exil surtout au niveau de l’identité culturelle.
Par ailleurs, Natacha Abingeneye, responsable du département épanouissement social et culturel de l’association Jambo, fera un état des lieux de la pratique du Kinyarwanda par les ressortissants rwandais en général.
De plus, plusieurs présentations seront données par des spécialistes, notamment, entre autres, sur « la nouvelle manière d’enseigner la langue maternelle ».
Un autre aspect de la culture rwandaise sera également mis en valeur lors de cet événement, notamment la danse traditionnelle rwandaise et ce par un spectacle des plus jeunes du ballet Inyange. Les plus jeunes du ballet Afribel quant à eux joueront une pièce de théâtre.
Un évènement à ne donc pas rater pour tous ceux qui sont soucieux de la lutte contre l’extinction du Kinyarwanda, cette langue bantoue aux multiples richesses.
Laure Uwase
Jambonews.net
[2]Traduction : « Les intellectuels ne parlent que des langues étrangères, qui transmettra notre culture ? »