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Rwanda – Général Jeva (FLN) : « La lutte armée n’est pas la seule alternative »

Rwanda – Général Jeva (FLN) : « La lutte armée n’est pas la seule alternative »

Les Forces de Libération National (FLN) est un mouvement armé dit de libération appartenant au Conseil National pour le Renouveau et la Démocratie (CNRD), un parti politique d’opposition rwandaise. Le FLN a vu le jour le 10 juin 2016, peu après de la scission entre les FDLR et le CNRD. A la suite de ce schisme, des affrontements violents ont éclaté entre les deux organisations « sœurs », qui avaient des divergences de vision. Le CNRD-FLN, composé majoritairement de jeunes, voit le jour avec notamment la volonté de renégocier les conditions d’un retour pacifique des réfugiés rwandais.

C’est ainsi qu’en décembre 2016, le CNRD est co-fondateur du Mouvement Rwandais pour le Changement Démocratique (MRCD-Ubumwe), une plateforme politique devant réunir plusieurs partis d’opposition. A la suite des élections présidentielles de 2017, remportées sans commune mesure par Paul Kagame, ainsi que de la modification constitutionnelle lui permettant de régner sur le Rwanda jusqu’en 2034, un tournant est effectué dans l’opposition politique rwandaise. Dès juillet 2018, le CNRD met sa branche armée sous la coupole de la plateforme politique du MRCD. La coalition annonce par voie de communiqué que « Le FLN usera de tous les moyens possibles, y compris la lutte armée, pour chasser le FPR du pouvoir, puisqu’il a refusé toutes les voies pacifiques. » Le 15 juillet 2018, Callixte Sankara, devenue porte-Parole des FLN, revendique des attaques contre des cibles militaires dans les districts de Cyangugu, Nyamagabe, Nyaruguru, Bugesera et Huye.

Durant les 2 ans qui suivront, plusieurs opérations seront menées contre des cibles militaires ou étatiques dans le sud du pays. Les FLN mèneraient ces attaques en partant de la forêt de Nyungwe où ils se situeraient depuis 2 ans.

Le 10 juin 2020, dans un communiqué signé par les présidents des 3 autres membres de la coalition, à savoir Paul Rusesabagina (PDR-Ihumure), Faustin Twagiramungu (RDI-Rwanda Nziza) et Kassim Butoyi (RRM), la plateforme MRCD a annoncé exclure le CNRD de la coalition. De Facto, le FLN a donc également été écarté et il est donc retourné sous la coupole de son parti politique d’origine, le CNRD. 

Depuis la fin de la « guerre des infiltrés » (intambara y’abacengenzi) en 1998, il n’y avait quasiment plus eu d’attaque de rebelles armés sur le sol rwandais. Pourtant depuis 2017, il y a une importante recrudescence d’actions menées sur le territoire rwandais contre le pouvoir afin de contraindre le régime du FPR-Inkotanyi.

Afin de comprendre et de saisir les tenants et aboutissants de ce phénomène, Jambonews a souhaité rencontrer les acteurs de cette nouvelle vague. C’est ainsi que nous avons eu un entretien il y a quelques semaines avec la nouvelle présidente du CNRD, madame Francine Umubyeyi. Cette fois, nous avons pu nous entretenir avec le général de brigade Antoine Hakizimana, dit « Jeva ». C’est un commandant de secteur opérationnel au sein des Forces de Libération Nationale et c’est aussi le Coordinateur des Opérations du FLN.

Lors de la conversation téléphonique que nous avons eu pour réaliser cette interview, le Général Jeva nous a dit se situer à Nyamagabe (dans le sud du Rwanda).

Jambonews : Pouvez – vous brièvement vous présenter ? 

Gen. Antoine Hakizimana « Jeva » : Bonjour, Messieurs les journalistes de Jambonews! Avant de me présenter, je voudrais d’abord vous remercier  de m’avoir accordé cette occasion propice pour cette interview avec votre journal Jambonews que je respecte beaucoup pour le rôle de ses publications dans la recherche et la communication de la vérité.

En ce qui me concerne personnellement, comme vous venez de me le demander, je réponds au nom de Général de Brigade JEVA ANTOINE HAKIZIMANA. Je suis âgé de 47 ans. Je suis originaire de l’ancienne Préfecture de Cyangugu, Commune Kirambo; actuellement c’est dans la Province de l’Ouest, District de Nyamasheke. Je suis marié à Madame JEANNETTE MUKAMUHIRE TUMUSIFU, avec qui nous avons eu deux enfants, une fille, JOY GLOIRE UWERA SOLANGE  âgée de 14 ans et un garçon, EDI DIEU MERCI NIYONZIZA BIENVENUEâgé de 11ans. Ils ont tous été kidnappés par le régime terroriste du FPR depuis  l’année passée, lors de l’opération ignoble de rapatriement forcé des réfugiés rwandais de KALEHE en novembre et décembre 2019. 

Je suis le Commandant de l’un des Secteurs opérationnels au sein des Forces de Libération Nationale,  en même temps  le Coordinateur  des Opérations dans les FLN .

Je voudrais également profiter de cette occasion pour adresser mes chaleureuses salutations et mes sincères remerciements aux amis et connaissances et à tous ceux qui nous suivent maintenant, surtout les Intwarane, membres du CNRD-FLN et à tous les autres bienfaiteurs qui soutiennent d’une manière ou d’une autre notre noble tâche de libérer notre chère patrie, le Rwanda.

Que faisiez-vous avant 1994 au Rwanda ?

Merci Mr le journaliste pour cette question. J’ai terminé mes études secondaires en juin 1993 à l’ École des Sciences de Byimana, option Math-Physique. En août 1993, notre Eglise EMLR m’a affecté à l’Institut John Wesley de Kibogora ( IJW )en tant que animateur, en attendant une bourse d’études supérieures à l’étranger, bourse qui sera torpillée par le chaos qui a suivi le crash de l’avion du Président Juvenal Habyarimana. Ce n’est que plus tard en 1999 que j’aurai une autre chance de faire les études supérieures à l’Université de Lubumbashi (UNILU), dans la faculté de Médecine humaine, études interrompues en première année de Doctorat suite à la chasse aux alliés rwandais décidée par le Gouvernement congolais en septembre 2002 qui a été couronnée par les tristes événements de Kamina du 01 novembre 2002.

Pourquoi avez-vous fui vers la RDC ?

Encore une fois merci pour cette question très importante.

Pour y aller tout droit, j’ai fui vers la RDC en 1994 avec d’autres civils parce que le FPR et son armée APR arrivaient partout en tuant les gens très sauvagement et sans distinction, ce qui faisait peur à tout le monde. Et vous savez vous-mêmes qu’à cette époque, bien sûr à cause des tueries du FPR, beaucoup de gens  ont pris fuite vers les pays limitrophes. C’est dans ce contexte que je me suis retrouvé en exil en RDC, le  Zaïre de l’époque.

« Les armes pour nous défendre et pour protéger dans la mesure du possible les réfugiés innocents que le FPR était en train  d’égorger comme du gibier »

Une fois arrivé en RDC, pourquoi avez-vous décidé de prendre les armes contre l’État rwandais nouvellement en place ? Quel était le sens de votre combat ?

Merci, Mr le journaliste  pour cette bonne question. Je voudrais vous dire que je n’ai pas pris les armes directement après mon exil en 1994. Les crimes que le FPR a commis au Rwanda depuis 1990 me faisaient déjà penser à prendre les armes contre ce mouvement terroriste. Mais ce sont ceux qu’il a commis contre la population réfugiée en exil à l’Est de la RDC lors de la destruction des Camps devant les yeux de tout le monde sous le silence de la communauté internationale, qui nous ont  décidé, moi et beaucoup d’autres jeunes réfugiés, à prendre les armes pour nous défendre et pour protéger dans la mesure du possible les réfugiés innocents que le FPR était en train  d’égorger comme du gibier. La plupart de ces crimes sont bien mentionnés dans le Mapping Report confectionné après des enquêtes menées sur terrain par des Experts de l’ONU. Ça dépassait vraiment l’entendement, tout patriote et tout autre personne douée de bon sens et d’humanité ne pouvait pas rester les mains croisées. Franchement, c’est à partir de ce jour où les réfugiés étaient en train d’être sauvagement massacrés par l’armée de Paul Kagame, que j’ai bien saisi  la signification profonde et la valeur d’un pays natal. Dès lors, le sentiment révolutionnaire et le sens patriotique m’ont fait comprendre que défendre les opprimés est l’affaire de tout le monde. Les réfugiés étaient en état de nécessité, j’ai donc pris les armes.

En ce qui concerne le sens de notre combat : compte tenue de ce qui s’est passé et de ce qui se passe actuellement au Rwanda où la situation est devenue pire qu’ avant, à cause du régime sanguinaire du FPR INKOTANYI, nous luttons pour libérer notre patrie, le Rwanda en l’arrachant des griffes du FPR INKOTANYI qui s’est avéré incapable de gouverner pacifiquement le pays. Nous voulons que  la démocratie dans sa véritable forme s’instaure dans notre pays, pour  que l’injustice prenne fin et que le Rwanda soit un État de droit respectueux des valeurs humaines. Je  voudrais vous assurer et assurer tout le monde surtout les Rwandais opprimés que nous sommes déterminés à atteindre ce noble objectif quel que soit le prix que cela va nous coûter. C’est ça le sens de notre combat.

Camp de réfugiés de rwandais hutu à Goma © DR

Pourquoi avez-vous rejoint le CNRD après la scission d’avec les FDLR ?

Permettez-moi d’abord que j’apporte un certain éclaircissement. Je n’ai pas rejoint le CNRD-Ubwiyunge,  mais je suis parmi ses membres fondateurs, voire même parmi ses concepteurs.

Nous avons dû fonder le CNRD-UBWIYUNGE parce que l’allure des FDLR dans la lutte de libération du Rwanda n’était plus  convenable aux objectifs fixés et devenait de plus en plus dérapante et très languissante, voire stagnante. Malgré les conseils prodigués à maintes reprises, les autorités des FDLR n’ont pas montré la bonne foi de rectifier le tir afin de revenir sur les rails. La dernière solution possiblequi restait, c’était alors de faire une révolution au sein du mouvement pour entreprendre la libération de notre chère patrie  avec un nouvel élan. C’est ce que nous avons réalisé par la« Révolution Pacifique » du 30 mai 2016suivi par la fondation du CNRD-UBWIYUNGE le 31 mai 2016et la création des FLN le 10 juin 2016.

« Les forces négatives sont celles qui se coalisent pour attaquer à balles réelles une population civile réfugiée »

Le 13 décembre 2019 dans un discours sur l’état de la nation, le Président Félix Tchisekedi a annoncé que « les FARDC avaient détruit, à plus 95%, les bases des forces négatives du CNRD avec un bilan de plus de 1712 capturés parmi lesquels 245 combattants et 10 leaders politiques ». Cette annonce était consécutive à une opération d’envergure menée par les FARDC contre le CNRD à Kalehe au mois de décembre 2019. Est- ce que le CNRD existe encore ?

Permettez-moi, Mr le journaliste, de donner encore une fois des rectifications: le CNRD et les FLN ne sont pas des forces négatives. Ce sont plutôt des forces démocratiques luttant pour un changement positif dans le pays et dans la région. J’estime qu’il y a des forces négatives, ce sont celles-là qui se coalisent pour attaquer à balles réelles une population civile réfugiée vivant en symbiose avec la population autochtone qui l’a accueillie malgré l’insouciance de la communauté internationale.

Pour revenir à votre question, ce que le Président Tshisekedi a dit n’est qu’un langage purement politique. Dire qu’il a détruit les bases du CNRD à 95% est une exagération, parce que parmi les 250.000 réfugiés recensés en RDC par HCR et CNR, il y avait beaucoup de membres du CNRD. Mais comme il a parlé des capturés, il devrait aussi préciser combien de civils, de femmes, de vieillards et d’ enfants que ses forces armées et leurs alliés RDF ont tué durant cette honteuse opération. C’est vraiment dommage d’observer  deux gouvernements sensés connaître le droit international sur les réfugiés et les droits de l’homme et deux armées de deux États indépendants membres de l’Organisation des Nations Unies, armées sensées connaître le droit international humanitaire ou droit de la guerre, coalisés et en train de détruire par des fusils  et des bombes un camp de réfugiés inoffensifs tout près d’un camp des forces onusiennes. Cela arriva pourtant une nième fois en novembre-décembre 2019 en RDC, plus précisément en territoire de KALEHE, à KITINDIRO tout près d’une base militaire de la MONUSCO chargée de maintien de la paix dans la zone. Et un Président comme Félix Antoine Tchisekedi n’a pas honte de s’en vanter! Alors qu’il devrait plutôt être poursuivi pour un tel crime contre l’humanité.

Revenons aux chiffres de 95%. Franchement, Mr le journaliste, malgré les opérations contre les réfugiés menées par la coalition FARDC-RDF, le CNRD-UBWIYUNGE existe encore et se porte très bien. Nous avons des membres dans tous les coins du globe, sur tous les continents.  Même en RDC, surtout dans les deux Kivu, le CNRD-UBWIYUNGE est encore actif. Vous conviendrez avec moi que  ces 1712 réfugiés ne correspondent pas à 95% de tous les membres du CNRD parmi les 250 000 réfugiés recensés en RDC. Je précise que la partie du CNRD attaquée est uniquement celle qui se trouvait dans le territoire de KALEHE qui, même dans sa totalité ne correspondrait pas à 95% de tous les membres du CNRD-UBWIYUNGE. Quant à cette partie de KALEHE, elle a bien entendu subi un choc, mais les réfugiés après avoir rejoint leur frères dans les territoires de FIZI  et MWENGA et les agents de sécurité rejoint leur camarades au Rwanda dans la forêt de Nyungwe, ils se sont déjà remis du choc subi. Certes, nous avons pleuré les nôtres qui ont perdu la vie dans le territoire de KALEHE et dans le Parc de Kauzi-Biega . Nous sommes sûrs que tôt ou tard les auteurs de ces tueries seront traduits devant la justice parce que en général après  la guerre ,il y a la justice ou le Conseil de guerre. En bref, Je précise à présent que le CNRD-UBWIYUNGE est  déjà réorganisé et il tient bon.

D’après les communiqués du MRCD, les opérations menées contre le CNRD à Kalehe étaient menées par l’armée rwandaise. Sur quoi vous appuyez-vous concrètement pour affirmer cela ?

Oui, Mr le journaliste, c’est la réalité dans ces opérations contre le CNRD, il y avait les militaires des Rwandan Defense Forces. Je vous en donne la précision moi qui avait laissé les agents de sécurité sur terrain pour protéger les  réfugiés abandonnés par la communauté internationale depuis la destruction des camps à l’Est de la RDC en 1996. Nous confirmons cela parce que nous les avons vus et entendus partout où ils passaient en parlant le Kinyarwanda. Deuxièmement nous disposons des informations fournies par nos agents de renseignement dans le camp adverse, celles fournies par des blessés capturés, par la population autochtone qui les voyaient traverser leurs villages. À part cela, et tout le monde peut en témoigner, sous la facilitation et la collaboration de Gen Bde Gahizi Innocent des FARDC, outil de Kigali et qui aussi été reconnu dans les tueries des réfugiés Rwandais à Buguri – Kashebere en janvier 2019,  ils avaient érigé à Kibabi, entre septembre et octobre 2019, des positions visibles sur les montagnes. Donc, Mr le Journaliste, ce ne sont pas des spéculations, mais des informations sûres et  bien vérifiées.

« Est-ce que le gouvernement d’un pays où la population de toutes les catégories et de toutes les ethnies prend fuite chaque jour suite aux persécutions par les différents services étatiques n’est pas un gouvernement terroriste?« 

Le gouvernement rwandais vous accuse d’être une organisation terroriste, que répondez-vous à ces accusations ?

 Encore une fois merci, Mr le journaliste, pour cette question très intéressante.  Pour y répondre, posons-nous cette question :

Lorsque le FPR se battait sur le champ de bataille en 1990, est-ce qu’on l’ appelait une organisation terroriste ? Je pense que non. Et vous êtes sans ignorer des crimes très graves de guerre et contre humanité commis à cette époque dont il est responsable. Comment alors que le CNRD-UBWIYUNGE qui n’est pas sur la liste des terroristes établie par l’ONU et qui n’est accusé d’aucun crime comparable à ceux commis par le FPR peut-il être qualifié de terroriste? Ce que vous devez connaître c’est que dans sa propagande médiatique, notre adversaire a toujours cherché à nous coller à tort tous les mauvais qualificatifs possibles, mais la communauté internationale, supposée neutre, est là pour juger chacun sur ses faits et trancher.

Les propos de Kigali  ne sont donc qu’un alibi fabriqué dans l’intention de ternir l’image du CNRD-UBWIYUNGE. Mais à l’heure où nous sommes, la communauté rwandaise et la communauté internationale ont  découvert les manœuvres mensongères du régime du FPR-INKOTANYI.

En principe, avant d’accuser les autres, il faudrait d’abord se contrôler pour voir si vous-mêmes vous êtes saints. Est-ce que le gouvernement d’un pays où la population de toutes les catégories et de toutes les ethnies prend fuite chaque jour suite aux persécutions par les différents services étatiques n’est pas un gouvernement terroriste? Vous savez très bien que ses agents secrets tuent, arrêtent arbitrairement ou enlèvent  les gens sans merci, tant dans le pays qu’à l’étranger. Les plus visés étant les opposants politiques et leurs anciens collaborateurs qui ont préféré l’exil en lieu et place de continuer de maltraiter leurs compatriotes innocents. De pareils cas sont de notoriété même sur le sol étranger comme en RSA, en Ouganda, en RDC, au Kenya, pour ne citer que ceux-là. Alors, comment appelleriez-vous cela si ce ne sont pas des actes terroristes ?  Je crois que j’ai bien répondu à votre question.

Le Général de Brigade « Jeva » dans un uniforme des RDF récupéré lors d’une opération des FLN contre une position de l’armée rwandaise à Bweyeye (dans le sud du pays)

« Croyez-vous que les Tutsi qui fuient le régime du FPR pourraient rejoindre les rangs des FLN s’ils y voyaient en nous une menace« 

Le pouvoir de Kigali, vous accuse également d’être « les descendants de forces génocidaires » et que « vous souhaitez poursuivre le génocide perpétré contre les Tutsi ». Que dites- vous de cela ?

Vous savez, Mr le journaliste, la politique de Kigali est fondée sur  le mensonge systématique et Kigali cherche toujours à manipuler l’opinion internationale. Il est bien connu que la responsabilité pénale est individuelle.  Mais au Rwanda ce n’est pas le cas. Kigali  essaie toujours de coller ces accusations aux innocents jusqu’aux enfants mêmes nés plus tard après le génocide rwandais de 1994 comme dans la fable du Loup et de l’ Agneau, juste pour faire souffrir la famille de celui qu’on veut écarter injustement de la politique. C’est ce qu’ils appellent cyniquement « déraciner le génocide ». Donc pour eux, la responsabilité pénale est collective.  Ce qui prouve qu’aujourd’hui le Rwanda est loin d’être un État de droit. Même en supposant que certains de nos ascendants aient réellement commis de telles infractions, Sauf le sentiment de vouloir faire mal aux autres, le Président Kagame lui-même sait très bien qu’un enfant peut agir différemment de ses parents. C’est peut-être pourquoi Kagame lui-même ne considère pas Bernard Makuza comme son père Anastase Makuza .

Considérant alors l’accusation comme quoi « nous souhaitons poursuivre le génocide perpétré contre les Tutsi » : croyez-vous que les Tutsi qui fuient le régime du FPR pourraient rejoindre les rangs des FLN s’ils y voyaient une telle menace ? Impossible ! J’en profite pour informer le régime de Kigali, la communauté nationale et internationale, que les FLN sont composées des membres issus de toutes les ethnies du Rwanda et que tous les membres du CNRD-UBWIYUNGE et des FLN cohabitent  et travaillent ensemble comme des frères. Pour me résumer, les propos du régime du FPR à ce sujet sont démodés.

« La lutte armée n’est pas la seule alternative pour résoudre les problèmes politiques rwandais« 

La lutte armée est-elle la seule alternative pour atteindre l’objectif que se fixe le CNRD ?

Je suis d’avis Mr le journaliste, que la lutte armée n’est pas la seule alternative pour résoudre les problèmes politiques rwandais. Mais comme le Président Kagame refuse catégoriquement  le dialogue inclusif avec son opposition tant armée que politique, la lutte armée s’avère nécessaire et opportune en vue de le ramener à la raison. C’est la seule voie qui reste pour lui , accepter la voie pacifique du dialogue.

Depuis 2018, les FLN, à l’époque branche armée du MRCD (la plateforme politique à laquelle le CNRD appartient), ont mené des opérations de guérilla à partir de la forêt de Nyungwe (au sud du Rwanda). Vos Troupes sont-elles encore au Rwanda ?

Oui, Mr le Journaliste. Les FLN se trouvent toujours sur le sol de notre chère patrie dans plusieurs coins du pays. Et les opérations militaires vont se poursuivre bien sûr au rythme de guérilla avant la phase décisive de passage à la guerre classique, pour vous en témoigner.

Avez-vous le sentiment d’avoir le soutien de la population rwandaise ? 

Merci beaucoup pour cette question. Nous avons le soutien de la population rwandaise parce qu’elle est, elle-même, fatiguée de tous les maux et surtout des injustices de tout genre que le régime du FPR ne cesse pas de lui faire subir. À cela s’ajoutent, une multitude d’ impôts exorbitants lui exigés par le régime, contrairement aux slogans que le FPR clamait en octobre 1990.

Ainsi, une telle population ne manquera pas de soutenir à tout prix celui qui apporte le changement pour apaiser la souffrance terrible qui pèse sur elle.

« La population rwandaise n’est pas inquiète du risque d’une nouvelle guerre parce qu’elle vit déjà des moments extrêmement plus difficiles et plus durs que la guerre« 

Comprenez-vous que la population rwandaise soit inquiète du risque d’une nouvelle guerre après les années tragiques qu’elle a vécues?

A mon humble avis, quand vous vivez longtemps des moments durs, à un certain moment vous souhaitez coûte que coûte vous en sortir quel que soit le prix à payer et quelles que soient les circonstances du changement. C’est tout à fait évident.

En d’autres termes, la population rwandaise n’est pas inquiète du risque d’une nouvelle guerre parce qu’elle vit déjà des moments extrêmement plus difficiles et plus durs que la guerre, des moments de désespoir qu’elle n’avait jamais vus ni vécus avant l’avènement du régime du FPR-INKOTANYI. Donc pour elle, mieux vaut mourir en luttant que mourir à genoux ou la tête basse.

Que demandez-vous à la République Démocratique du Congo où vous êtes installés ainsi qu’à la communauté internationale dans son ensemble ?

Il importe de donner des précisions encore une fois que les FLN ne sont plus en RDC. Ils sont plutôt sur le sol de leur pays natal. En RDC, il reste seulement les réfugiés ainsi que les agents de sécurité pour la protection et la sécurité de ceux-ci. Donc, je ne manquerai pas de demander deux choses à la RDC :

– la première est  de respecterles droits des réfugiéset les droits fondamentaux de la personne humaineselon les conventions internationales qu’elle-même a ratifiées, parce que beaucoup de réfugiés ont été tués sur le sol congolais et la main de son gouvernement dans ces crimes n’est pas moindre;

– la deuxième est le respect des droits des prisonniers de guerre. Sur ce, leur transfert au Rwanda devrait se faire dans les normes internationales pour que les familles puissent connaître le sort de leurs enfants à travers le CICR ou les organismes de droits de l’Homme. Or, la façon dont les capturés ont été transférés au Rwanda, lors des différentes opérations conjointes avec le Rwanda contre les réfugiés et les agents de sécurité des camps des réfugiés, fait plutôt penser à la traite négrière qu’à une quelconque extradition judiciaire ou un quelconque échange de prisonniers de guerre.

Quant à la Communauté internationale, nous demandons qu’elle mette la pression sur le régime de Kigali pour le convaincre d’accepter de résoudre pacifiquement les problèmes politiques rwandais  à travers un dialogue politique franc et inclusif avec son opposition.Elle devrait également étudier et trouver une solution durable aux problèmes des réfugiés rwandais en RDC, recensés et reconnus par la Commission Nationale des Réfugiés (CNR) et par le HCR , mais exterminés sans cesse par l’armée rwandaise sur le sol congolais grâce à  l’aval du gouvernement actuel de la RDC. Ladite pression devrait également s’exercer sur le gouvernement de la RDC  pour qu’il traite les réfugiés suivant les normes internationales et respecte les droits des  prisonniers de guerre en général.

« À l’heure qu’il est, ce qui est important et urgent, ce sont des actions qui inspirent de la confiance au peuple rwandais« 

Pour terminer, l’opposition politico-militaire rwandaise est marquée par plusieurs divisions. La scission entre le CNRD et les FDLR a créé des tensions importantes, avant cela le RUD-Urunana s’était déjà détaché. Est- ce que vous pensez qu’aujourd’hui les conditions sont réunies pour une réunification ?

C’est vrai, des divisions se sont souvent produites au sein de l’opposition politico-militaire rwandaise. Mais en réalité ces divisions sont de deux catégories :

– Il y a d’une part des scissions opérées par des dissidents téléguidés consciemment ou inconsciemment par l’ennemi.

– Il y a d’autre part, des dissidences opérées par ceux qui découvrent la main de l’ennemi ou la déviation des objectifs au sein de la direction de l’organisation et préfèrent se mettre à part pour bâtir un nouveau système non infiltré et rectifier la ligne de conduite de l’organisation vers les objectifs fixés. D’après les propos du Général Kabarebe, le FPR a toujours procédé par la provocation des divisions au sein de l’opposition rwandaise dans le but de l’affaiblir. Ceci dit, nous devons beaucoup apprendre de tous ces événements, bien analyser les causes de ces dissidences, mettre à côté ce qui nous divise parce que cela ne profite qu’à l’ennemi, et nous rassembler plutôt autour de l’objectif de libérer notre patrie.Cette unité ne doit pas rester en paroles, mais doit être concrétisée par  les actes. Nous avons un même ennemi qui veut nous écarter de la gouvernance de notre pays et continuer à opprimer surtout la population de l’intérieur. L’union fait la force, mais cela passe par un processus qui doit commencer par la collaboration. Au fur et à mesure que se crée la confiance mutuelle, on pourra en arriver à former une coalition, et plus tard on en arrivera à la réunification ou fusion. À l’heure qu’il est, ce qui est important et urgent, ce sont des actions qui inspirent de la confiance au peuple rwandais. Voilà tout.

Avez-vous un message pour les Rwandais? 

Bien sûr ! Un message pour le peuple rwandais ne peut pas manquer, parce que c’est pour eux que nous menons la lutte.

Premièrement, il doit savoir que ce qui se fait actuellement dans notre pays est pire que tous les maux ayant caractérisé les régimes antérieurs au régime du FPR-INKOTANYI.

Deuxièmement, les Rwandais se trouvant à l’extérieur sont aussi victimes de la chasse à l’homme menée par le FPR-INKOTANYI. certains ont plutôt accepté d’être au service du FPR de peur d’être tués.

L’objectif du FPR est de s’éterniser au pouvoir et opprimer tout le monde et que chaque Rwandais se laisse asservir par lui, afin qu’il puisse écarter ceux dont il n’a plus besoin. J’exhorte tous les Rwandais à se lever tous ensemble et faire chacun ce dont il est capable dans le sens de nous libérer et libérer notre patrie. Nous ne devons pas accepter d’être utilisés par le FPR-INKOTANYI pour tuer ou opprimer nos compatriotes.Tuer ton compatriote sans motif valable, uniquement parce qu’on vous l’ordonne, équivaut à un suicide. Au lieu de se laisser tuer moralement, ou de se laisser tuer progressivement par l’ennemi, umwanzi yica umwe umwe uko ashaka, mieux vaut se mettre ensemble pour combattre celui qui vous amène dans ces salles besognes. Quelques-uns mourront, mais les autres remporteront la victoire. Mais si nous croisons les bras, tout le monde sera exterminé. En attaquant le Rwanda, le FPR  avançait le prétexte de vouloir résoudre définitivement le problème des réfugiés, réduire sensiblement les impôts, supprimer les travaux communautaires instaurés par Habyarimana, instaurer la démocratie. Mais qu’a-t-il fait ?

Les impôts se sont multipliés,  notamment : la cotisation exigée  du FPR , du FAERG, la taxe sur presque toute chose ; sur le bétail, les maisons, les parcelles, la mutuelle de santé qui est censé soutenir les plus démunis mais qui est en réalité un leurre, …

Le problème des réfugiéss’est plutôt aggravé. Aux réfugiés Hutu s’ajoutent les réfugiés Tutsi qui, malgré leur soutien à la création du FPR,  fuient cette fois-ci ses tueries.  

L’umuganda est devenu obligatoire,même pour les invalides et les vulnérables auxquels le FPR promet toutes sortes d’aides. 

Quant à la démocratie, il est impossible d’en parler, car quiconque ose se porter candidat aux présidentielles se retrouve jeté en prison ou purement et simplement sa candidature est rejetée. Les candidats venant de l’opposition extérieure voient leur visa d’entrée au pays refusé. L’exemple le plus parlant est celui du Dr Théoneste NIYITEGEKA qui risque de mourir en prison, tout simplement parce qu’il a voulu poser sa candidature aux élections présidentielles alors qu’il n’est pas de la classe dirigeante de Paul KAGAME.

À tout cela s’ajoutent les tueries et les tortures, les injustices, la destruction des maisons des habitants, empêcher les gens de cultiver les cultures de leur choix et beaucoup d’autres obligations illégitimes de toutes sortes.

Et la solution, les Rwandais de la diaspora sont forcés de faire le commerce pour le compte du parti au pouvoir. Mais la solution idéale n’est pas d’accepter cette tyrannie à contre cœur. C’est plutôt d’avoir le courage de la combattre et, s’il faut mourir, autant mourir comme un héros et non comme un vaurien. En effet, nous mourrons tous un jour.

Tout cela prouve que l’avenir du Rwanda et du peuple rwandais est sombre. C’est pourquoi il est temps de nous lever tous ensemble pour combattre la dictature du FPR. Ce ne sont pas les moyens qui manquent. Sinon nous risquons de mourir comme des imbéciles. Il y a un proverbe rwandais qui le dit mieux : »Uyima igihugu imbwa zikayanywera ubusa »c’est à dire  » si vous refusez de verser votre sang pour la Nation, vous n’empêcherez pas aux chiens d’en profiter gratuitement « .

La Nation a besoin de héros. Que chacun d’entre nous soit un héros dans son domaine et à son niveau. Je vous remercie.

Entretien réalisé au téléphone par Emmanuel Hakuzwimana et Norman Ishimwe

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