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Rwanda : le RIB, instrument de harcèlement des opposants

Rwanda : le RIB, instrument de harcèlement des opposants

Être convoqué par l’organe étatique d’investigation et répondre à la convocation ne devrait pas être un problème ; ça ne le devient que lorsque cet organe recourt au harcèlement, à l’intimidation, à la concoction d’accusations, à la torture, à la détention illégale, sans oublier l’assassinat des citoyens qu’il est censé protéger. Tous ces actes illégaux continuent de ternir la réputation du Rwanda Investigation Bureau (RIB).

Mis en place depuis près de 3 ans, officiellement comme organisme officiel chargé de l’application de la loi, le RIB est vite devenu synonyme de terreur dans le cœur des Rwandais. Il a été à plusieurs reprises auteur de nombreux cas de kidnapping, de torture, de détention illégale, de disparition forcée, d’assassinats et d’enquête sans conclusions. L’agence est également connue pour son inaction face aux récurrents cas de fusillades et autres violations de droits humains régulièrement commises par les membres de la police rwandaise. En moins de trois ans, le RIB a réussi à s’imposer en véritable outil du contrôle total de tout un peuple.

Au moment où l’on constate que les opposants au régime du FPR continuent d’être assassinés, emprisonnés ou contraints à l’exil, la dictature militaire dirigée d’une main de fer par le général Paul Kagame est en train d’utiliser le RIB pour intimider et réduire au silence trois des rares dernières voix des sans-voix qui restent au Rwanda.

Victoire Ingabire, la présidente du parti d’opposition Dalfa-Umurinzi emprisonnée pendant huit ans, entre 2010 et 2018, reçoit très régulièrement des convocations du RIB auxquelles elle n’a d’autre choix que de répondre. Elle a récemment dénoncé la torture mentale qui lui est infligée à chaque fois qu’elle répond à ces convocations. Obligée de se présenter au RIB dès le matin, elle est ensuite confinée plusieurs heures seule dans une pièce, sans rien à boire ni à manger, pour enfin être interrogée pendant 30 minutes en fin de journée seulement.  « Pourquoi avez-vous créé un nouveau parti politique ? » ; « Nous t’interdisons de tenir des réunions », sont les sujets qui reviennent régulièrement au cours de ces interrogatoires.

Malgré ces intimidations, elle a promis au peuple rwandais de ne pas céder aux provocations et au harcèlement. Pour elle, « la lutte non violente pour le changement et la démocratie demande des sacrifices et de rester courageux ».

Fred Barafinda Sekikubo, président du parti d’opposition RUDA, affirme de son côté avoir subi des enlèvements et des tortures depuis qu’il a publiquement dénoncé l’injustice cumulée à laquelle le FPR soumet le peuple rwandais. Très récemment il dit aussi avoir miraculeusement échappé à plusieurs autres tentatives de kidnapping orchestrées par des agents du RIB.

Dans son discours d’indignation Barafinda interroge : «Vous dites que le Rwanda a des ennemis, mais pourquoi les Rwandais fuient-ils le pays alors qu’il n’y a pas de guerre ? Pouvez-vous nous dire où sont allés les gens qui habitaient les quartiers de Rusororo, Muhima, Kiyovu et autres ? Pouvez-vous nous dire où sont allés ces gens qui ont été récemment expulsés de leurs habitations sous prétexte de les protéger contre les inondations ? Qui connait réellement leur sort, qui s’en soucie ? Personne ! Allez voir en Ouganda, il y a actuellement des nouveaux réfugiés rwandais qui se sont enfuis très récemment ! Quelle est la cause de leur fuite ? Il ne faut pas maltraiter l’être humain. Vous me voyez parler seul mais je représente beaucoup de victimes. Malgré des tortures qu’ils m’ont fait subir je reste toujours debout. Vous savez, ils m’ont enlevé et détenu plus de cinq fois ! Ils me menottaient les bras et les pieds puis me plaçaient dans un cercueil, c’est une torture inimaginable.»

Le 12 février 2020, le RIB annonçait l’avoir interné à l’asile psychiatrique Caraes de Ndera. 

Me Bernard Ntaganda, lui aussi président d’un parti d’opposition, le Parti socialiste Imberakuri, serait la dernière victime du RIB après avoir récemment effectué un comeback politique en s’associant avec Victoire Ingabire pour une activité qui consistait à rendre visite aux personnes dont les maisons ont été détruites afin de leur apporter soutien moral et aide matérielle, une activité notamment entravée par la police rwandaise. Ntaganda a lui aussi été convoqué par le RIB le matin du 12 février à 10h. Alors qu’il s’est présenté à l’heure indiquée, son entretien a été retardé puis ajourné au 26 février.

Ces persécutions contre des rares voix qui s’expriment au Rwanda restreignent, jour après jour davantage, une liberté d’expression déjà réduite depuis plusieurs années à peau de chagrin par l’un des régimes les plus répressifs du globe.

Alfred Antoine
Jambonews


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